VERONIQUE GOEL
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  HIDDEN CHARMS (2015-2016)

 

Photographies + cahier

24 photographies, couleur, impression pigmentaire sur papier FineArt, encadrées
Taille des images 26/ 34cm ou 34/26 - taille totale 34/42 ou 42/34cm

cahier: 24/28cm, 127 pages, 86 photographies couleur, sur papier artisanal, édition 2 exemplaires signés et numérotés.

(…) La série de photographies d’Hidden Charms est présentée sous différentes formes. Dans le cahier d’artiste édité en deux exemplaires, les prises de vue sont séquencées comme un parcours discontinu et panoramique, entrecoupé de cartes et de textes tirés des recherches ou écrits par l’artiste. En ouverture de l’ouvrage, une première vue marque le contraste entre une série de bâtiments alignés, datés de la fin du 19ème, et le chantier d’une tour presque achevée. Son architecture imposante barre le ciel qui se trouve réduit à une bande marginale dans les images suivantes, oblitéré par l’imbrication d’infrastructures urbaines. Il est revanche miroité par les façades en verre, tout en produisant l’illusion d’une transparence. Déployée tant à l’horizontale qu’à la verticale, la saturation du territoire annonce une exploitation illimitée de l’espace.
Rendus illisibles, les contours urbains n’offrent plus de coordonnées et de possibilités de se situer dans un environnement. En réponse à cette perte de repère, les cadrages mêmes des prises de vue questionnent les moyens de ce que Fredric Jameson nomme une « cartographie cognitive », soit une « reconquête pratique du sens du lieu et la construction ou la reconstruction d’un ensemble articulé pouvant être gardé en mémoire et que le sujet individuel puisse cartographier et recartographier au cours de ses trajectoires mobiles et changeantes ». Les traversées mobilisées par Véronique Goël travaillent ainsi les écarts différentiels entre la standardisation des nouvelles constructions et les zones où subsistent des milieux culturels hybrides. À ce titre, Bethnal Green constitue une poche où les strates des migrations successives sont visibles. Des activités artisanales et petits commerces s’exercent à une échelle locale. Mais pour combien de temps encore ?
Dans cette ville très étendue où la circulation en voiture est payante « intra muros » pour ceux qui n’y résident pas, et où les transports en commun sont onéreux, la mobilité géographique et sociale est entravée par des restrictions économiques. Par conséquent, la vue surplombante préconisée par le slogan immobilier « Have more fun at the top », favorise l’accès à une minorité fortunée de la population. En réponse à cette répartition spatiale des points de vue distribuée selon les appartenances sociales, la cartographie cognitive investit une économie moins spectaculaire dont celle des systèmes textuels du paysage urbain. Les médiations qu’offrent les panneaux publicitaires des chantiers permettent de localiser les structures non représentables de la société. Dans le cahier de l’artiste, les promesses de développement urbain sont contredites par la sélection d’articles de journaux qui rendent publics les revers des scandales financiers et politiques. La béance mémorielle laissée par les entrepôts rasés ou réaffectés est mise en perspective par les expressions les plus anodines, telle qu’une annonce désespérée qui se contente d’un espace de travail précaire, ou le graffiti d’Hidden Charms qui incite, avec un esprit de dérision, à voir les charmes cachés des sites délaissés. (…)
Geneviève Loup

extrait de: Hidden Charms Une exposition de Véronique Goël